La péremption d’instance, sanction du manque de diligences : la procédure à l’épreuve du temps long
Lorsqu’une instance est en cours, il peut se passer de longs délais sans que les parties n’accomplissent de diligences, c’est à dire des actes qui permettent de faire avancer l’affaire vers sa conclusion (comme par exemple le dépôt de conclusions, lettre à ou de l’expert, paiement des honoraires de l’expert, etc.).
Si ce délai atteint deux années (ce qui est fréquent lorsqu’une expertise est en cours), une partie peut arguer de la péremption d’instance, ce qui a pour effet de mettre un terme à l’instance (mais n’éteint pas l’action elle-même, c’est à dire le droit d’agir).
L’autre partie doit donc recommencer depuis le début son action, et perd le bénéfice des actes de procédures accomplis au cours de l’instance éteinte. Par exemple, le rapport d’expertise rendu au cours de l’instance périmée n’a plus qu’une valeur de simple renseignement…
Un exemple concret fera mieux saisir les enjeux pratiques de cette question en terme de durée de procédure. Une cour d’appel ordonne avant dire droit en 2009 une expertise. Une partie invoque la péremption d’instance faute de diligences interruptives entre la date de l’arrêt avant dire droit (2009) et la date du rapport d’expertise (2011). En 2012, la même cour d’appel rend une décision à la suite du dépôt du rapport d’expertise. Dans cet arrêt, la cour écarte la péremption, mais sans préciser quelles étaient les diligences qui avaient interrompu le délai de deux ans.
Un recours en cassation est intenté, et abouti avec succès en janvier 2016, la Cour de cassation censurant l’absence de précision quant aux diligences interruptives. L’affaire est renvoyée devant une autre cour d’appel pour trancher cette question, de telle sorte que le dossier initié en 2006 est encore en cours dix années plus tard…
Si la cour de renvoi retient l’existence d’une péremption d’instance, une partie devra recommencer, en 2017 au plus tôt, une procédure commencée en 2006, et susceptible de durer encore quelques années !
Il est donc primordial, pour la partie qui y a intérêt, de manifester par des actes réguliers son intention de poursuivre une instance, sous peine de perdre de longues années de procédure.